jeudi 12 juin 2008

Un journaliste guinéen réfugié politique en France



Photos : Allen Yero Emballo, journaliste guinéen, réfugié à la Maison des Journalistes de Paris

A Paris, avant la remise des prix, les rédactrices de Pink Paillettes ont assisté à la conférence du journaliste Allen Yero Emballo, guinéen réfugié politique en France.


« J'ai dénoncé ouvertement, par la voie des ondes »
Cet homme est journaliste de métier. Diplômé, il possède, entre autres, un Master de Communication de l'université de New Daily, parlant quatre langues européennes (anglais, français, espagnol et portugais), et sept langues locales (Afrique), spécialisé en journalisme d'investigation sur le trafic des narcotiques (drogues) : c'est un journaliste très réputé en Guinée Bissau. Il y animait une émission sur une radio nationale : « Bonjour, Bissau ».
Dans cette émission, un programme de société dans lequel le thème était choisi par les auditeurs, il laissait parler les gens : la polygamie, la drogue, le SIDA étaient des sujets fréquemment abordés par ses auditeurs. Allen Yero Emballo et ses auditeurs dénonçaient à la radio, publiquement, donc, ce qui n'allait pas dans leur pays. Par exemple, l'armée mal payée, mal instruite, mal formée, qui s'est adonnée à faciliter le trafic de drogues de la Colombie vers l'Europe !


La jeunesse européenne, un terreau fertile
La drogue, payée 2000 euros le kilo en Colombie, est revendue 60 000 euros le kilo en Hollande : de quoi attirer les hommes dans la complicité... L'armée, l'administration de Guinée, se sont laissé séduire par l'argent de la drogue : en Afrique transite le marché de la drogue vers l'Europe : Portugal, Espagne, France, Angleterre, Hollande : la jeunesse européenne consomme de la drogue dure. Allen Yero Emballo a dénoncé ce trafic de drogue afin de protéger la jeunesse.


Tentatives d'assassinat
Surveillé, il a reçu des menaces de mort. Il démissionne de la radio nationale pour travailler dans une radio privée. Il est victime de deux tentatives d'assassinat, sa famille est séquestrée, lui-même est victime d'une tentative d'enlèvement : résultat, pas d'enquête ouverte !!!
« Je dois partir, résume le journaliste, me préparer et revenir pour mieux lutter pour mon pays. » Allen Yero Emballo fait alors ce qu'il appelle « un saut dans l'inconnu » : 70 euros en poche, il prend l'avion, sans savoir qu'il existe à Paris une maison des journalistes pour l'accueillir pendant six mois, le temps pour lui de faire des papiers, de se déclarer réfugié politique. De faire venir sa famille. « Je suis parti de chez moi sur la pointe des pieds », ajoute-t-il.


Asile politique : parcours du combattant
Il a six mois pour être régularisé, pour mettre sa famille à l'abri en France. A la maison des journalistes, 230 hommes et femmes, comme lui, ont été hébergés, protégés, soutenus depuis 2003, date de son inauguration. Irakiens, iraniens, birmans, haïtiens... des journalistes sont venus chercher la tranquillité. Quinze médias français cotisent pour offrir la location d'une chambre : quinze chambres sont donc disponibles pour six mois à la maison des journalistes. Il avoue que le ministère de l'identité nationale ne simplifie pas sa tâche.
« Je rêve de rentrer au bercail. Je suis comme un cycliste dans une côte : si j'arrête de pédaler, je tombe », explique Allen Yero Emballo. Il reçoit des informations de Guinée, joint sa famille. Mais une famille sans homme, ce n'est pas pareil... « C'est la débandade ». Il avoue perdre le sommeil.
« Ni la justice, ni la police ne fonctionnent, chez moi. Comment voulez-vous que ma famille soit protégée ? ». La télévision est, en Guinée un média de luxe ; peu de foyers ont l'électricité. « Quand on vend des boucles d'oreilles dans un pays où les gens n'ont pas d'oreilles, personne ne les achète ! », conclut-il.


La liberté de la presse en France ?
Quand on lui demande ce qu'il pense de la menace éventuelle qui pèse en France sur la liberté de la presse, il assure « qu'un avion ne fait pas marche arrière, puisqu'il n'a pas de rétroviseur » : il est impossible pour le pays des droits de l'homme de faire machine arrière : la liberté de la presse nous est acquise.


Nous remercions Allen Yero Emballo pour cette conférence riche en leçons de vie. Et nous lui souhaitons de retrouver sa famille ainsi que la sérénité.

Agnès Dibot.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

BON DEPART